Document

• Auteur(s)Maupertuis, Pierre Louis Moreau de
• Auteur Années1698-1759
• Titre"Voici le rebours de ce qui se pratique au Théâtre ..."
• Date et lieu de création[1749-1750]
• Langue(s)fre

Publication, distribution

• Contexte-intertextePierre Louis Moreau de Maupertuis est un penseur, mathématicien, physicien, astronome et naturaliste français. Défenseur des théories newtoniennes, il a beaucoup contribué à les faire connaître en France. Il était le maître et l'ami d'Emilie Du Châtelet, compagne de Voltaire. Maupertuis commence son texte en citant la lettre qu'avait envoyée Voltaire à tous les amis de Madame Du Châtelet pour leur annoncer la naissance de sa fille : "Mr. de Voltaire l'ouvre par une rélation badine légère de l'accouchement de Mme Du Chatelet, il n'y a qu'un for vulgaire qui puisse la trouver indécente, Or ecoutés : « Madame à 2 heures après minuit griffonnant son Newton sent quelque petite chose, qui se trouve etre dans le moment une petite fille venue bien plus aisément qu'un problème sa femme de chambre n'a que le tem[p]s de la recevoir dans son tablier d'où elle la pose bien proprement sur un in-quatro, pendant que la mère delivrée du paquet revient à sa besogne, arrange ses papiers et ensuite va se mettre au lit seulement pour la forme." A titre de comparaison, Voltaire envoyait le 2 septembre, de Lunéville, une lettre sur le même ton au Comte d'Argental, faisant le même récit : "madame du Châtelet, cette nuit, en griffonnant son Newton, s'est senti un petit besoin; elle a appelé une femme de chambre qui n'a eu que le temps de tendre son tablier, et de recevoir une petite fille qu'on a portée dans son berceau. La mère a arrangé ses papiers, s'est remise au lit; et tout cela dort comme un liron; à l'heure que je vous parle»" (Œuvres complètes de Voltaire, Correspondance Générale, p.525).
  
  Emilie Du Châtelet (1706-1749) était une mathématicienne et physicienne française. Compagne de Voltaire de 1733 à 1749, elle mourut en sa compagnie après avoir accouché d'une fille, née le 4 septembre des suites de sa relation avec le poète Jean-François de Saint-Lambert (1716-1803). Elle fut l'élève de Clairaut et de Maupertuis (qui en 1732 était devenu son enseignant de mathématiques, et qui ensuite devint brièvement son amant). Elle a grandement contribué à défendre et à faire connaître la physique newtonienne en France, et entretenait un dialogue avec ses contemporains autour de la métaphysique leibnitzienne. Peu avant sa mort elle venait de terminer sa traduction et commentaire des "Principes Mathématiques" de Newton. En 1732, elle se rendait tous les mercredis (et non les samedis réservés uniquement aux hommes) pour assister aux séances de l'Académie des sciences. Elle s'invitait également au café Gradot, lieux de rencontre d'académiciens, penseurs et scientifiques. Pour y entrer, elle s'habillait en homme afin de pouvoir s’asseoir à la table de Maupertuis et participer aux conversations de ses collègues et amis. Quelques jours avant son accouchement, pressentant le danger où sa condition la mènera, Mme Du Châtelet envoie trois paquets auprès du bibliothécaire du Roi, qui seront reçus le jour de sa mort, contenant son commentaire sur le livre des Principes Mathématiques de Newton, qu'elle accompagne de la lettre suivante : "J'use de la liberté que vous m'avez donnée, Monsieur, de remettre en vos mains des manuscrits que j'ai grand intérêt qui restent après moi. J'espère bien que je vous remercierai encore de ce service et que mes couches, dont je n'attends que le moment, ne seront pas aussi funestes que je le crains. Je vous supplierai de vouloir bien mettre un numéro à ces manuscrits et les faire enregistrer afin qu'ils ne soient pas perdus".
  
  Les références de Maupertuis au "théâtre" et aux "scènes" du couple Voltaire et Du Châtelet font écho aux scènes que jouait publiquement le couple (et particulièrement Du Châtelet) à certaines occasions. Le Roi de Pologne, Stanislas Leszczynski, invitait souvent à Lunéville Voltaire et Mme Du Châtelet pour un été festif. Le couple contribuait beaucoup à distraire la petite cour du roi. Voltaire, se sentant trop fatigué cet été là, finit pourtant par la suivre. Ils furent très bien reçus (fêtes en série, spectacles et autres distractions) et y restèrent plusieurs mois. Mme du Chatelet enchaînera avec Voltaire plusieurs rôles et chantera des airs d'opéra presque tous les soirs. Réputée très bonne comédienne, elle préférait tenir les rôles de personnages féminins jugés par d'autres trop vulgaires et grossiers (ex: le rôle de Madame de la Cochonnière dans "Boursouffle"). Mme de Graffigny, une des invitées du Roi, notera (le 9 février 1739) : "Nous avons compté hier au soir que dans les 24 heures, nous avons tant répété que joué trente-trois actes, tant tragédie, opéra que comédie." (Correspondance de Madame de Graffigny, Oxford, Voltaire Foundation, 1985, Tome 1. I, p.313). C'est lors d'un de ces étés, en 1747, qu'elle rencontra le Capitaine Saint-Lambert dont elle tombera amoureuse. Le rendez-vous devait se répéter tous les étés. Après avoir suivi le roi et sa cour à Commercy et un bref séjour à Cirey puis à Paris, le couple a dû rentrer à Lunéville pour que Madame y accouche. Mme Du Châtelet y meurt six jours après la naissance de sa fille.
  À la révolution, en 1793, des patriotes briseront la dalle de sa sépulture à l’église, pilleront sa tombe, voleront ses bijoux et disperseront ses restes. Sa fille ne vécu que 19 mois.

Edition

Description matérielle

• TypeManuscript
• CollationUn bifeuillet (= 2 fols 220 x 170 mm) de papier vergé. Traces de pliures médianes. Léger foxing sur le pli intérieur du bifeuillet. Texte autographe écrit à l'encre brune sur les fols. 1r à 2r. (3 pages). Nombreuses ratures et corrections (particulièrement sur les deux premières pages de texte). Un tracé au crayon à papier se situe sur la marge d'une partie du texte au fol. 2r (partie dont le fac-similé fut publié en 1843). Au fol. 1r., inscriptions de libraire sur la marge supérieure ("5 [effacé] Maupertuis"; inscription identique à la fin du texte au fol. 2v, la même main y a hachuré le trait final de l'auteur) et marge inférieure ("M. Villenave" [nom d'un ancien collectionneur]). Petite trace de mouillure sur les dernières lignes du fol. 1v. Au fol. 2v à l'angle inférieur gauche, inscription à l'encre noire "m villenave". Le nombre 116, inscrit au crayon à papier à l'angle inférieur gauche de la pochette de conservation et du fol 1r., de la main du libraire Heinrich Hinterberger, correspond au numéro de ce ms. dans la liste tapuscrite envoyée par Stefan Zweig à Martin Bodmer, à l'occasion de la vente de sa collection. Sur la même pochette, à l'angle supérieur droit, la lettre "F" (calligraphiée) au crayon bleue (de la main de M. Bodmer pour "Französisch") et deux petits traits diagonaux à l'encre violette (de la main de S. Zweig).

Remarques

• Remarques généralesIl s'agit du brouillon d'un texte que Maupertuis aurait rédigé peu après le 10 septembre 1749 (mort de Mme Du Châtelet). La nature du texte reste inconnue, s'agissait-il d'une lettre, d'un éloge? Les fonds connus (Fonds Maupertius de l'Institut de France - Académie des sciences et à la BNF) ne conservent aucun manuscrit de ce texte au propre.
  
  Le texte de Maupertuis suit le ton innocemment léger de la relation de l'accouchement par Voltaire. Or, Voltaire, ignorait alors le danger de mort qu'encourait sa compagne. La reprise de cette légèreté dans un éloge pour la disparue a peut-être justifié que l'on en efface le contenu difficilement compréhensible, et que l'on n'en garde que le paragraphe final dans la parution du fac-similé (cf. Bibliographie).
• RésuméManuscrit autographe non signé et non daté revenant sur les circonstances de la mort de la physicienne française Emilie Du Châtelet et dressant son éloge.
• BibliographieTexte partiellement publié en fac-similé dans :
  - DELARUE, Th., lsographie des hommes célèbres, tome II, Truttel et Wurtz, Paris, 1843 : Google Books
  Autre référence :
  - Œuvres complètes de Voltaire: Correspondance générale, tome III, Lequien, Paris, 1823.

Identification

• ConstellationManuscrits Autographes
• PID2011
• Cotems. Bodmer M-24.1